LES EXPOS DéCO ET DESIGN à VOIR CET éTé PARTOUT EN FRANCE

L'été est la période parfaite pour s'octroyer des petits moments de détente. Pourquoi ne pas en profiter pour allier plaisir et culture en allant visiter une exposition ? Voici les rendez-vous à ne pas manquer pour les fans de la décoration et du design.

Virebent célèbre ses 100 ans

Au cœur de la vallée du Lot, près de Cahors, l'éditrice Frédérique Caillet et le designer Vincent Collin, également à la tête de la galerie Édition Limitée, ont repris et réenchanté en 2000 la manufacture de porcelaine Virebent. Pour célébrer son centenaire cette année, ils proposent une plongée dans son épopée industrielle et créative. Au programme, l'exposition « Regard ouvrier » rassemblant plus de 600 photos d'hier et d'aujourd'hui, l'inauguration d'un nouveau musée qui détaille les étapes de production des ateliers, la présentation de modèles et moules du XIXe siècle, des stands d'initiation… Pour l'événement, Virebent réédite également des modèles emblématiques des années 70, met en scène dans le jardin des pièces déclassées issues de collaborations passées avec différentes maisons (Diptyque, Cartier…) et artistes (Matali Crasset, Fabrice Hyber…), et organise des conférences et rencontres tout au long de l'été.

« Regard ouvrier », du 14 juin au 22 septembre 13, rue de l'Usine, Puy-L'Évêque (46) virebent.com

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Éric Schmitt, orfèvre verrier

Située au nord de Prague, la Bohême produit depuis des siècles des objets en verre et cristal qu'elle exporte dans le monde entier. Eric Schmitt se rend régulièrement dans la ville de Novy Bor, et réserve une semaine durant l'atelier Ajeto, où travaillent les meilleurs artisans de la région. Cette structure unique en son genre a été créée après la chute du communisme par le designer Borek Sípek (1949-2016), qui l'a conçue comme une scène de théâtre dotée de coursives où les visiteurs peuvent admirer les maîtres tchèques. Chacune des résidences en Bohême d'Eric Schmitt est pensée comme une phase d'expérimentation sur un matériau aux variations esthétiques inépuisables. Le designer effectue au préalable un travail de recherche formelle puis ses croquis préparatoires sont transmis aux verriers afin qu'ils préparent d'une part les moules en poirier dans lesquels la matière en fusion est soufflée, et d'autre part les verres, qui font l'objet d'un subtil travail de chimie chromatique. En effet, la couleur est un domaine qui conserve une part d'aléa, le verre soufflé n'acquérant sa teinte définitive qu'au bout de 24 heures, une fois refroidi. « Ce process m'intéresse car il recèle une part de mystère, explique le designer. C'est ce que je trouve le plus motivant : ne pas savoir exactement ce qui va se passer. Un rose peut devenir pâle comme de l'améthyste ou très dense. Dans tous les cas, le résultat est toujours subtil. »

Lors de son dernier séjour, Eric Schmitt avait en tête de créer des vases dans lesquels des sphères flotteraient au milieu d'une masse de verre. « Je pars toujours d'une forme cylindrique sur laquelle j'opère des déformations », dit-il. Pour cette session, il a demandé aux verriers de créer des creux qui accueillent ensuite des boules soufflées, donnant l'illusion qu'elles sont en suspension. « Travailler avec des formes simples est un vrai exercice de style ! », clame-t-il. Les pièces préparées à l'avance se sont matérialisées plus vite que prévu, ce qui a permis au créateur de poursuivre ses expérimentations avec les verriers. « J'en ai profité pour faire de l'improvisation. » Il dessine alors des croquis qu'il confie aux ouvriers. « Beaucoup de pièces sont issues de ce processus, confie-t-il. J'ai pris plaisir comme un réalisateur qui a encore de la pellicule à l'issue d'un tournage. »  Le fruit de ses dernières recherches est désormais exposé à la IBU Gallery, à Paris.

Du 7 juin au 31 juillet, « Vitis. Eric Schmitt » Ibu Gallery, 166, galerie de Valois, jardin du Palais-Royal, Paris-1er

Exposition « L'enfance du design »

Le début du XXe siècle marque le changement de la place de l'enfant au sein de la famille et de la société. Les chambres des bambins deviennent des espaces à part dans lesquels ils peuvent exprimer leur identité. Au même moment, partout dans le monde, des designers renommés commencent à imaginer meubles et accessoires pour nos tout-petits. Ils intègrent une dimension aussi ludique que pédagogique à leurs créations, travaillent la multifonction, le transformable, et font de l'école leur nouvelle salle de jeu. Ils profitent également dans les années 70 de la révolution industrielle et de l'essor du plastique pour créer des pièces à la portée de tous, colorées et légères. Icônes du début du XXe siècle à aujourd'hui, les designers Alvar Aalto, Pierre Chareau, Charles Eames, Marcel Gascoin, Pierre Guariche, Enzo Mari ou encore Philippe Starck sont ainsi réunis au Centre Pompidou pour une rétrospective à la découverte de l'histoire du mobilier pour enfant. Une exposition à visiter… en famille !

Jusqu'au 12 août, « L'Enfance du design. Un siècle de mobilier pour enfant » à la Galerie 3 du Centre Pompidou

Ulla Rosen Winbladh Culioli, de l'ombre à la lumière

Il est des découvertes qui éblouissent. Il en fut ainsi pour la galeriste Odile Ouizeman qui, après le confinement, tomba sur l'œuvre d'une artiste passée aux oubliettes de l'histoire, Ulla Rosen Winbladh Culioli. Née en 1928 à Stockholm et morte en 2012 en France, l'artiste aura passé plusieurs décennies à tisser, dessiner, ou encore imaginer des collages, à l'ombre des murs de sa maison en Corse. En 1994, la galeriste aperçoit pour la première fois deux de ses œuvres, des grandes tapisseries accrochées aux murs de l'appartement d'un de ses amis, l'écrivain Gabriel-Xavier Culioli, fils d'ulla – « J'étais étudiante en art, se souvient Odile Ouizeman et, à l'époque, mon regard ne s'y était pas attardé. » Mais, quelque trente ans plus tard, alors qu'elle revoit une tapisserie de l'artiste, elle est éblouie. « En existe-t-il d'autres ? », demande-t-elle à la famille. Oui, sur l'île de Beauté, dans la maison familiale. Elle s'y rend et découvre, médusée, une quarantaine de tapisseries rangées dans des sacs-poubelle à la cave.

Un monde s'ouvre à elle, celui d'une œuvre et d'une femme libre et engagée. La femme d'abord. Ulla Rosen Winbladh Culioli est née en Suède d'une mère qui a quitté l'Ukraine lors de la révolution russe. Son enfance chahutée la conduit à se réfugier dans le dessin. À 15 ans, en pleine Seconde Guerre mondiale, elle ment sur son âge pour s'engager auprès de la Croix-Rouge suédoise. Elle arrive en France en 1946 où elle rencontre son futur mari, Antoine Cucioli, éminent linguiste avec lequel elle aura trois enfants, puis s'engage au Parti communiste avant d'en claquer la porte en 1956. Elle s'active pour la libération de prisonniers durant la dictature de Pinochet, héberge des étudiants grecs qui fuient le régime des Colonels en Grèce, et côtoie le cercle d'intellectuels proches de son mari, Louis Althusser, Pierre Vidal-Naquet… Quant à l'œuvre, elle naît au début des années 60, lorsqu'elle commence à broder sur des toiles de jute avec de la laine mèche, son matériel de prédilection, qu'elle va chercher au marché Saint-Pierre.

Sous ses doigts, c'est tout un monde qui éclôt, inspiré des mythologies nordiques, grecques, sud-américaines, et dont les couleurs se déploient, vibrantes. une procession de guerriers à têtes de chien, une scène de chasse dans le Grand nord sortie d'un conte… « Cette fusion entre l'homme et l'animal, la forte présence du végétal… Son œuvre résonne complètement avec notre temps », raconte Odile Ouizeman. Mais l'artiste brûlera dans les années 90 les écrits qui auraient pu éclairer son travail, et fera même disparaître certaines de ses pièces. Et la galeriste d'ajouter : « On est totalement passé à côté de son œuvre à une époque où, malheureusement, les femmes artistes étaient dans l'ombre. » Aujourd'hui, alors que le Musée d'Art moderne de Tbilissi (Géorgie) vient de lui consacrer une exposition et que la galeriste s'apprête à présenter une sélection de ses pièces dans son nouvel espace, une maison-galerie orchestrée par l'architecte Christian Pottgiesser, Ulla Rosen Windbladh Culioli semble enfin entrer dans la lumière. »

Du 6 juin au 20 juillet, « Ulla Rosen Winbladh Culioli. Broder le rêve, tisser le réel » à la galerie Odile Ouizeman 8, rue Galvani, Paris-17e galerieouizeman.com

Jean Lurçat, précurseur et engagé

Céramiques mais aussi peintures, dessins, tapisseries et mobilier… La rétrospective consacrée à Jean Lurçat (1892-1966) plonge le visiteur dans l'œuvre d'une figure essentielle des arts décoratifs français du XXe siècle. Les quatre thèmes élémentaires (la Terre, le Feu, l'Eau et l'Air) révèlent un engagement constant face aux paradoxes d'un monde en proie aux conflits et aux crises climatiques. L'exposition souligne notamment le dialogue initié par Jean Lurçat entre art et Histoire, à travers « Le Chant du Monde », vision post-apocalyptique imprégnée des tourments des guerres mondiales. Les 200 œuvres rassemblées par le musée Hyacinthe-Rigaud mettent en lumière le riche univers esthétique de cet acteur central du renouveau de la céramique dans les années 1950, comme de la tapisserie d'Aubusson.

Jusqu'au 29 décembre, « Jean Lurçat – La Terre, le Feu, l'Eau, l'Air » Musée d'art Hyacinthe-Rigaud, 21, rue Mailly, Perpignan musee-rigaud.fr

« Aubusson tisse Tolkien »

Sept années auront été nécessaires aux ateliers d'Aubusson pour donner naissance aux seize tissages inspirés de l'œuvre de J.R.R. Tolkien. L'auteur de « Bilbo le Hobbit » et du « Seigneur des anneaux » a accompagné l'écriture de ses romans fondateurs de séances de dessins, désormais conservés à la Bodleian Libraries d'Oxford. Ce sont eux qui ont servi de points de départ à trente artisans de la Cité internationale de la tapisserie d'Aubusson. Celle-ci réunit leurs 150 m2 de tissages, mais ne se contente pas de montrer les œuvres achevées. Elle offre également une plongée fascinante dans la genèse de cette aventure textile, les visiteurs suivant tout le processus créatif, de la réalisation des cartons à la teinture et la confection au point noué. Chaque étape du projet est documentée, pour découvrir les dessous de cette entreprise artistique monumentale.

Jusqu'au 22 septembre Cité internationale de la Tapisserie, rue des Arts, Aubusson (Creuse)

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